Lorsque vous sollicitez un crédit immobilier, la souscription d’une assurance emprunteur constitue une exigence incontournable des banques. Cette assurance protège à la fois l’établissement prêteur et l’emprunteur en cas d’aléas de la vie comme le décès, l’incapacité de travail ou l’invalidité. Pour les personnes ayant traversé un cancer, cette étape peut susciter de nombreuses interrogations : une guérison depuis plus de 5 ans permet-elle d’accéder à une assurance de prêt dans des conditions normales ?
La réponse est désormais largement positive. Grâce au « droit à l’oubli » instauré par la convention AERAS et renforcé par la loi Lemoine de 2022, les personnes guéries d’un cancer depuis plus de 5 ans bénéficient d’avantages considérables. Le droit à l’oubli permet aux personnes ayant été atteintes d’un cancer de ne plus avoir à le déclarer 5 ans après la fin du protocole thérapeutique et en l’absence de rechute. Concrètement, cela signifie qu’un ancien cancer en rémission depuis plus de 5 ans ne doit plus être mentionné dans le questionnaire médical, et qu’aucune surprime ou exclusion de garantie ne peut être appliquée pour ce motif.
Cette évolution majeure facilite considérablement l’accès au crédit immobilier pour les anciens malades. Toutefois, certaines conditions doivent être respectées, et des nuances persistent selon le type de cancer, l’âge de l’emprunteur ou le montant du prêt. Dans cet article, nous vous expliquons précisément les impacts d’une guérison de plus de 5 ans sur votre souscription d’assurance emprunteur, les dispositifs légaux qui vous protègent, et les stratégies à adopter pour optimiser votre dossier.
Cadre juridique et réglementaire
La convention AERAS : principes et obligations des assureurs
La convention AERAS (Assurer et Emprunter avec un Risque Aggravé de Santé) constitue le socle du dispositif d’accès à l’assurance emprunteur pour les personnes présentant ou ayant présenté des problèmes de santé graves. Cette convention a pour objet de proposer le plus grand nombre de solutions pour permettre aux personnes ayant ou ayant eu un problème grave de santé d’emprunter.
Les assureurs signataires de cette convention s’engagent à examiner attentivement chaque dossier selon un processus en trois niveaux d’analyse. Si le premier niveau refuse la demande, le dossier est automatiquement réexaminé par un service médical spécialisé, puis éventuellement par un pool de réassureurs. Cette organisation permet d’élargir les possibilités d’assurance même pour les profils considérés à risque aggravé de santé.
Important : la convention AERAS n’ouvre pas un droit à l’assurance, mais elle permet de repousser les limites de l’assurabilité. Les assureurs conservent donc la possibilité de refuser une couverture, mais ils doivent respecter un cadre précis dans leur évaluation des risques.
Le droit à l’oubli : historique, évolution et conditions actuelles
Le droit à l’oubli représente une avancée historique pour les anciens malades du cancer. Initialement fixé à 10 ans, ce délai a été progressivement réduit pour faciliter l’accès au crédit. La proposition de loi adoptée définitivement le 17 février 2022 par le Parlement réduit à cinq ans le droit à l’oubli pour les personnes ayant eu un cancer.
Cette évolution majeure découle de la loi Lemoine, qui a profondément transformé le paysage de l’assurance emprunteur en France. Le droit à l’oubli signifie concrètement que vous n’êtes plus tenu de déclarer votre ancien cancer dans le questionnaire médical, et que les assureurs ne peuvent pas appliquer de surprime ou d’exclusion de garantie liée à cette pathologie passée.
Condition de 5 ans après la fin du protocole thérapeutique
Pour bénéficier du droit à l’oubli, trois conditions cumulatives doivent être respectées :
- Le délai de 5 ans : Il s’applique aux personnes ayant achevé leur protocole thérapeutique depuis plus de 5 ans, sans constat de rechute. Ce délai commence à courir à partir de la fin complète du traitement (chirurgie, chimiothérapie, radiothérapie, hormonothérapie, etc.).
- L’absence de rechute : Aucune récidive ne doit avoir été constatée durant ces 5 années. Cette condition est essentielle pour maintenir le bénéfice du droit à l’oubli.
- La limite d’âge : Le dispositif s’applique aux personnes de moins de 71 ans à l’échéance du contrat. Si votre prêt se termine après vos 71 ans, le droit à l’oubli ne s’appliquera pas automatiquement.
Les cas où le droit à l’oubli s’applique
Le droit à l’oubli concerne tous les types de cancers, sans distinction. Toutefois, certaines situations particulières méritent clarification :
Le droit à l’oubli s’applique quand :
- Vous avez plus de 5 ans de recul depuis la fin complète du protocole thérapeutique
- Aucune rechute n’a été constatée pendant cette période
- L’échéance du prêt intervient avant vos 71 ans
- Le cancer concerné a été entièrement traité
Cas particulier : Si vous présentez des séquelles du cancer ou de ses traitements (fatigue chronique, neuropathies, complications cardiaques dues à la chimiothérapie), ces affections devront être déclarées indépendamment du droit à l’oubli, car elles constituent des problèmes de santé actuels.
Suppression du questionnaire médical : la révolution de la loi Lemoine
Au-delà du droit à l’oubli, la loi Lemoine a introduit une mesure révolutionnaire : les crédits dont la part assurée par personne ne dépasse pas le montant de 200 000 euros ne nécessitent plus de remplir un questionnaire de santé au moment de la souscription à une assurance emprunteur.
Cette disposition s’applique sous deux conditions :
- Le montant du prêt n’excède pas 200 000 € par assuré (soit 400 000 € pour un couple empruntant ensemble)
- Le prêt doit être remboursé avant le 60ème anniversaire de l’emprunteur
Pour les emprunteurs concernés, cette suppression du questionnaire médical représente une simplification majeure. Même si vous n’avez pas atteint les 5 ans requis pour le droit à l’oubli, vous pouvez obtenir une assurance sans déclarer votre état de santé, pourvu que vous respectiez ces plafonds.
Astuce Utwin : Si votre projet immobilier dépasse légèrement les 200 000 €, envisagez d’ajuster votre apport personnel pour passer sous ce seuil. Cette stratégie peut vous éviter un questionnaire médical complexe et d’éventuelles surprimes.
Limites légales : ce que la loi n’impose pas aux assureurs
Malgré ces avancées législatives, il est crucial de comprendre les limites du dispositif. La convention AERAS n’ouvre pas un droit à l’assurance. En d’autres termes, même si vous bénéficiez du droit à l’oubli ou de la suppression du questionnaire médical, aucun texte n’oblige un assureur à vous proposer un contrat.
Les assureurs conservent leur liberté contractuelle et peuvent :
- Refuser d’assurer certains profils, même après 5 ans de guérison
- Appliquer des exclusions de garanties pour d’autres motifs médicaux
- Demander des examens complémentaires en cas de doute
- Évaluer le risque global de votre dossier au-delà du seul critère du cancer
Cette réalité souligne l’importance de bien préparer votre dossier et de solliciter plusieurs assureurs pour comparer les offres. Un courtier spécialisé comme Utwin peut vous accompagner dans cette démarche.
Impacts pour l’emprunteur guéri depuis plus de 5 ans
Obligation de déclaration dans le questionnaire médical
Lorsque vous bénéficiez du droit à l’oubli, vous n’avez aucune obligation légale de mentionner votre ancien cancer dans le questionnaire médical. Cette non-déclaration n’est pas considérée comme une fausse déclaration ou une omission : c’est un droit protégé par la loi.
Concrètement, si le questionnaire de santé vous interroge sur vos antécédents de cancer, vous pouvez répondre « non » en toute légalité, à condition de respecter les critères du droit à l’oubli (plus de 5 ans depuis la fin du protocole, absence de rechute, échéance avant 71 ans).
Astuce Utwin : Conservez précieusement les documents médicaux attestant de la fin de votre traitement et de l’absence de rechute. En cas de litige ultérieur, ces preuves vous permettront de démontrer que vous remplissiez bien les conditions du droit à l’oubli au moment de la souscription.
Ce qu’il faut déclarer malgré le droit à l’oubli
Le droit à l’oubli concerne exclusivement le cancer lui-même. En revanche, vous devez impérativement déclarer :
- Les séquelles persistantes : Si votre traitement contre le cancer a provoqué des complications durables (problèmes cardiaques liés à la chimiothérapie, troubles respiratoires après une chirurgie pulmonaire, neuropathies, fatigue chronique sévère), ces affections actuelles doivent être mentionnées. Elles constituent des problèmes de santé indépendants qui peuvent influencer votre assurabilité.
- Les affections nouvelles liées : Si vous développez une pathologie en lien avec vos traitements antérieurs (par exemple, une cardiopathie induite par certaines chimiothérapies), celle-ci doit être déclarée comme un problème de santé actuel.
- Les suivis médicaux actifs : Si vous bénéficiez d’un suivi médical rapproché en raison de risques persistants (même sans rechute constatée), cette situation peut nécessiter une déclaration selon la formulation des questions du questionnaire.
Important : Omettre volontairement de déclarer des problèmes de santé actuels constitue une fausse déclaration qui peut entraîner la nullité du contrat d’assurance. La frontière peut parfois sembler floue : en cas de doute, sollicitez les conseils d’un courtier spécialisé comme Utwin.
Tarification et surprime
En principe, le droit à l’oubli interdit toute surprime liée à l’ancien cancer. Toutefois, dans la pratique, certaines situations peuvent générer des coûts supplémentaires :
- Cas 1 : Séquelles déclarées : Si vous devez déclarer des séquelles persistantes, l’assureur peut appliquer une surprime spécifiquement pour ces complications, indépendamment du cancer lui-même. Si vous êtes en rémission depuis moins de 5 ans, vous aurez probablement une surprime ou des exclusions sur votre assurance de prêt immobilier.
- Cas 2 : Dépassement des conditions : Si vous ne remplissez pas toutes les conditions du droit à l’oubli (délai insuffisant, échéance après 71 ans), l’assureur peut librement évaluer votre risque et appliquer une surprime. Les taux varient considérablement selon le type de cancer et le profil de l’emprunteur.
- Cas 3 : Contexte médical complexe : Si vous présentez d’autres facteurs de risque cumulés (diabète, hypertension, antécédents familiaux lourds), l’assureur peut majorer votre tarif pour ces motifs, même si le cancer bénéficie du droit à l’oubli.
Tarification sans surprime
Lorsque toutes les conditions du droit à l’oubli sont réunies, vous devez bénéficier d’une tarification normale, identique à celle d’une personne n’ayant jamais eu de cancer. Aucune majoration ne peut être appliquée au motif de votre ancien cancer.
Cette tarification standard s’applique à l’ensemble des garanties proposées (décès, PTIA, IPT, ITT). Vous devez pouvoir souscrire la même couverture qu’un emprunteur standard, sans restriction liée à votre passé médical.
Si un assureur applique malgré tout une surprime en évoquant votre ancien cancer alors que vous remplissez les conditions du droit à l’oubli, il commet une irrégularité. Vous pouvez contester cette décision et, si nécessaire, saisir la commission de médiation AERAS.
Exclusions de garanties
Même lorsque le droit à l’oubli s’applique, certains assureurs peuvent tenter d’introduire des exclusions de garanties pour d’autres motifs. Ces pratiques, bien que parfois contestables, existent :
- Exclusion des récidives : Certaines compagnies peuvent exclure la prise en charge d’une éventuelle rechute du cancer, même après le délai de 5 ans. Cette pratique est juridiquement discutable car elle contourne l’esprit du droit à l’oubli.
- Limitation des garanties incapacité/invalidité : Certains contrats peuvent réduire la couverture en cas d’incapacité temporaire de travail (ITT) ou d’invalidité permanente totale (IPT), en invoquant des risques résiduels liés aux traitements antérieurs.
- Exclusion des affections liées : L’assureur peut exclure les pathologies directement causées par les traitements anticancéreux (par exemple, une cardiopathie liée à la chimiothérapie).
Conditions spécifiques sur les garanties PTIA, IPT et ITT
Les garanties complémentaires au décès méritent une attention particulière :
- PTIA (Perte Totale et Irréversible d’Autonomie) : Cette garantie couvre les situations de dépendance totale nécessitant l’assistance d’une tierce personne pour les actes essentiels de la vie quotidienne. Les assureurs acceptent généralement de couvrir cette garantie sans exclusion liée à l’ancien cancer, sauf séquelles très invalidantes.
- IPT (Invalidité Permanente Totale) : Cette garantie intervient en cas d’invalidité supérieure à 66%. Elle peut faire l’objet d’exclusions si l’assureur estime que des séquelles du cancer augmentent le risque d’invalidité.
- ITT (Incapacité Temporaire de Travail) : Cette garantie, souvent optionnelle, couvre les arrêts de travail. Elle est fréquemment exclue ou limitée pour les personnes ayant des antécédents médicaux lourds, même avec le droit à l’oubli.
Pour les emprunteurs bénéficiant pleinement du droit à l’oubli et sans séquelles déclarées, ces garanties doivent en principe être proposées sans exclusion spécifique. Toutefois, la pratique des assureurs varie considérablement.
Conseils pratiques pour l’emprunteur et le courtier
Préparation du dossier médical
Un dossier médical bien préparé est votre meilleur atout pour obtenir une assurance de prêt aux meilleures conditions. Voici les documents essentiels à réunir :
- Certificats de fin de traitement : Demandez à votre oncologue ou médecin traitant un document attestant de la date exacte de fin de votre protocole thérapeutique. Ce certificat doit mentionner l’absence de traitement actif (hors éventuelle hormonothérapie de maintenance, selon les protocoles).
- Comptes-rendus de suivi : Collectez vos derniers bilans médicaux (au moins les 2-3 dernières années) : analyses biologiques, imageries (scanner, IRM, TEP), consultations de suivi. Ces documents démontrent l’absence de rechute.
- Rapport anatomopathologique initial : Ce document décrit précisément le type de cancer diagnostiqué, son stade, son grade et ses caractéristiques moléculaires. Il permet aux médecins-conseils des assureurs d’évaluer le pronostic initial.
- Courrier médical de synthèse : Idéalement, demandez à votre médecin référent de rédiger un courrier de synthèse destiné aux assureurs, résumant votre parcours, votre état actuel et le pronostic favorable. Un document rédigé par un professionnel de santé a plus de poids qu’une simple déclaration personnelle.
- Rapports d’imagerie récents : Les examens radiologiques récents (scanner thoraco-abdomino-pelvien, mammographie, échographie) sans anomalie sont particulièrement rassurants pour les assureurs.
Astuce Utwin : Organisez ces documents dans un ordre chronologique clair et ajoutez une page de synthèse listant les éléments clés : type de cancer, date de diagnostic, traitements reçus, date de fin de traitement, nombre d’années de recul, absence de rechute. Cette présentation professionnelle facilite le travail des médecins-conseils et accélère le traitement de votre dossier.
Collaboration avec le médecin traitant ou l’oncologue
Votre médecin est un allié précieux dans votre démarche d’assurance :
- Expliquez votre projet : Informez votre médecin de votre projet immobilier et de vos démarches d’assurance. Un médecin conscient des enjeux sera plus enclin à rédiger des documents adaptés.
- Sollicitez un courrier détaillé : Demandez un courrier médical qui va au-delà du simple certificat. Ce document devrait idéalement mentionner : le type exact de cancer, le stade initial, les traitements reçus, la durée du recul, l’absence totale de signe de rechute, votre état de santé global actuel et une appréciation pronostique favorable.
- Vision objective du risque : Les médecins ont l’habitude de communiquer avec les assurances et savent quel niveau de détail fournir. Un courrier trop alarmiste peut vous desservir, tandis qu’un courrier trop optimiste manquera de crédibilité. Cherchez l’équilibre en présentant factuellement votre situation.
- Anticipez les questions : Les médecins-conseils des assureurs posent souvent des questions spécifiques. Demandez à votre médecin d’inclure les réponses aux interrogations courantes : présence de facteurs pronostiques défavorables, existence de séquelles, nécessité d’un suivi rapproché, pronostic à moyen et long terme.
Solliciter plusieurs assureurs et comparer les offres
Ne vous contentez jamais de la première proposition reçue, surtout en cas de risque aggravé de santé. Les assureurs n’appliquent pas tous les mêmes critères d’évaluation, et leurs grilles tarifaires varient considérablement.
- Multipliez les demandes : Contactez au minimum 3 à 5 assureurs différents. Certaines compagnies sont spécialisées dans les profils à risque aggravé et proposent des tarifs plus compétitifs.
- Utilisez un courtier spécialisé : Un courtier connaît les pratiques de chaque assureur et peut immédiatement identifier ceux qui sont les plus favorables à votre profil. Cette expertise vous fait gagner un temps précieux et optimise
En résumé
Grâce à la loi Lemoine et à la convention AERAS, la souscription d’une assurance emprunteur après un cancer guéri depuis plus de 5 ans n’est plus un parcours du combattant. Le droit à l’oubli et la suppression du questionnaire médical pour certains prêts marquent une véritable avancée en matière d’équité et d’inclusion. Ces dispositifs permettent aux anciens malades d’accéder au crédit immobilier dans des conditions désormais similaires à celles des autres emprunteurs.
Cependant, il reste essentiel de bien comprendre les conditions d’application de ces droits et de préparer soigneusement son dossier. Les séquelles persistantes, le montant du prêt ou l’âge à l’échéance peuvent encore influencer la décision de l’assureur.
Dans ce contexte, le recours à un courtier spécialisé comme UTWIN constitue un atout majeur. Il vous accompagne dans l’analyse de votre situation médicale et financière, compare les offres et veille à ce que vos droits soient pleinement respectés.
En résumé, une guérison de plus de 5 ans ouvre aujourd’hui de réelles perspectives d’accès au crédit et à l’assurance, à condition d’être bien informé et bien accompagné.